« Marinette fait des vagues » : le théâtre jeunesse en pleine effervescence à la Bibliothèque Félix Couchoro

CULTURE SOCIETE

C’est dans les allées feutrées de la Bibliothèque Félix Couchoro, haut lieu de savoir niché au cœur de la Commission Nationale de la Francophonie – Togo, que s’est tenue, du 22 au 25 avril 2025, une rencontre artistique aussi vibrante qu’émouvante. Portée par le programme « Texte à Lire au Jeu », l’édition 2025 de la Pépinière – Ateliers de lecture et de mise en voix a mis à l’honneur le texte Marinette, écrit en 2024 par l’auteure malienne Jeanne Diama, en collaboration étroite avec un groupe d’élèves du primaire. Un texte né sous le sceau du collectif, de l’écoute et de la transmission intergénérationnelle.

Ce projet d’envergure, rendu possible grâce au soutien précieux de Ressources Éducatives, de l’AFD et de l’Institut français, s’inscrit dans une dynamique affirmée : celle de faire du théâtre jeune public un levier de sensibilisation à la lecture et à l’écriture, mais aussi un espace d’expression libre, joyeuse et partagée.

Quand l’atelier devient scène, et la scène devient école

Initialement conçu pour vingt élèves, l’atelier a très vite été victime de son succès : trente-deux enfants, âgés de 7 à 11 ans, issus du CE1 au CM2, ont répondu présents, avec enthousiasme et ferveur. Devant cet engouement inattendu, les organisateurs ont fait le choix de ne laisser personne de côté : une dizaine d’enfants supplémentaires ont pu assister aux séances en tant qu’auditeurs actifs, nourrissant leur imaginaire au contact de leurs camarades.
Une manière élégante d’illustrer la philosophie inclusive du projet : aucune voix n’est trop petite pour ne pas être entendue.

Ces quatre jours de lecture, de mise en voix et de mise en espace ont été animés avec sensibilité par Félicité Notson Kodjo-Atsou, artiste et pédagogue, qui a su tisser avec délicatesse un lien entre le texte et les jeunes participants. Les séances ont été ponctuées d’exercices corporels, de jeux vocaux, de discussions autour du sens et de l’émotion, et surtout, d’un travail collectif de construction de sens, fondé sur l’écoute et la valorisation de chacun.

Le point d’orgue de cet atelier fut sans conteste la restitution publique qui s’est tenue le samedi 3 mai 2025. En à peine dix minutes de présentation, les élèves ont su captiver un auditoire de 95 personnes : parents, enseignants, amoureux des arts et simples curieux venus découvrir le fruit de cette aventure humaine et artistique. Les mots de Marinette, portés haut par des voix encore fragiles mais pleines de cœur, ont trouvé un écho profond dans le regard du public.

Une dynamique de transmission et de continuité

L’un des moments les plus touchants de cette restitution fut sans doute la présence d’anciens élèves ayant participé à l’écriture du texte en 2024. Désormais collégiens, ils sont revenus, sourire aux lèvres et souvenirs plein la tête, encourager leurs « petits frères et sœurs » de plume. Certains ont exprimé leur regret de ne pas être montés eux-mêmes sur scène cette année, mais ont confié leur joie de voir vivre le texte à travers la relève.
Un témoignage qui illustre la profondeur de ce projet : le théâtre ici ne se limite pas à une activité extra-scolaire, il devient un lien, un héritage, une mémoire en mouvement.

Dans un contexte où les défis éducatifs sont nombreux, cette initiative prouve qu’il est possible de réconcilier les jeunes avec la lecture, non pas en leur imposant des textes, mais en les impliquant dans leur création, leur appropriation et leur incarnation.

Un projet qui prend racine et s’étend

La suite de cette aventure ne fait que commencer : les ateliers se poursuivent du 7 au 24 mai 2025, dans d’autres lieux partenaires. Partout, la même ambition guide les pas de l’équipe : offrir à la jeunesse togolaise un accès équitable à l’éducation artistique et culturelle.

Il convient ici de saluer l’engagement sans faille de l’école partenaire de la bibliothèque, qui depuis l’an dernier soutient activement ce programme. Par son ouverture et son implication, elle contribue à faire germer l’idée que la culture est un droit, et non un luxe.

Au final, « Marinette » n’est pas qu’un personnage de théâtre : c’est un prétexte à rêver, un prétexte à dire, à lire, à écrire, à se découvrir dans le regard de l’autre. Un texte-pont, un texte-seed (graine), dont les racines s’enfoncent doucement dans les esprits curieux, et dont les fruits, demain, nourriront peut-être les scènes du Togo et d’ailleurs.